Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Jeu De Paum

Jeu De Paum
Publicité
Jeu De Paum
30 octobre 2010

Remember ! Souviens-toi !


Une jeune femme entre dans la chambre, court vers mon lit et se jette sur moi. Elle prend ma tête entre ses deux mains et m’embrasse sur la joue.

« Désolée, le docteur a dit que je ne devais pas faire ce genre de chose pour ne pas te brusquer mais je suis tellement contente que tu sois réveillé et… »

Elle continue de parler mais il m’est difficile de la suivre. A la place, je l’observe. Elle s’est assise sur une chaise à côté de mon lit mais a gardé une main posée sur la mienne. Elle est très élégante, elle porte un pantalon à rayures marrons avec un petit chemisier beige et deux perles nacrées brillent sur ses oreilles. Je me demande qui ça peut bien être, ma sœur ? Ma petite-amie ? Ma femme ?? Ou juste une bonne amie ? Elle doit avoir la vingtaine, peut-être un peu plus. Moi on m’a annoncé tout à l’heure que j’en avais vingt-six, avant cela, je ne savais pas si j’étais un quinquagénaire, un nouveau-né ou un martien même si j’aurais eu tendance à dire que je venais de naître.

Une autre femme est venue me voir avant elle mais tout ce que j’ai enregistré c’est que c’était ma mère, les détails je les ai oubliés. C’est déjà une piste de plus concernant la femme qui est à côté de moi et qui n’est donc vraisemblablement pas ma mère.

Elle parle encore mais ne s’est toujours pas présentée. Je sens pourtant qu’elle en connaît long sur moi et ça me bouffe déjà de jalousie.

Je l’interromps :

« Qui es-tu ? »

Elle semble tétanisée un instant par la question puis me répond :

« Maurine, ta…euh…ton amoureuse. »

Elle eut un petit sourire craquant en disant cela. En effet, je la trouvais craquante mais malheureusement c’est tout ce que je pouvais ressentir pour elle.

« Ne t’inquiète pas ça te reviendra petit à petit. On va rentrer à la maison, ça va sûrement te rappeler plein de choses ! »

En même temps que son sourire était rempli d’espoir, une larme était prête à s’échapper de son œil droit. De nous deux, c’est elle qui semblait la plus inquiète, moi je découvrais.

 

 

Il y avait un digicode en bas de l’immeuble, Maurine me suggéra de le noter pour ne pas l’oublier. Je suivis son conseil. Ensuite on prit l’ascenseur malgré que l’appartement ne soit qu’au deuxième étage car nous étions chargés de mes bagages. J’ai passé quatre jours dans le coma, m’a-t-elle dit sur le chemin. Quatre jours dans le coma ou ailleurs ça n’avait pas d’importance pour moi, je ne m’en souvenais pas.

« Et voilà, c’est chez nous. »

Je me retrouvais à l’entrée d’un grand appartement qui sentait la même odeur que le parfum qui avait embaumé la pièce quand Maurine était entrée dans ma chambre d’hôpital. Il y avait un coin cuisine avec un bar qui faisait office de séparation avec le séjour : un sofa, un piano, des photographies en tout genre, de tous les formats et au minimum trois par mûr.

Maurine s’occupait déjà de ranger mes bagages.

« Le médecin a dit que ça serait bien d’acheter une télé car ça peut t’apporter des connaissances que tu as perdu. Tu n’en as jamais voulu, tu disais que ça t’enlevait des neurones et maintenant ça va t’aider à les récupérer, c’est plutôt ironique non ? »

« Tu joues du piano ? »

Elle s’approcha de l’instrument et commença à pianoter et chanter :

« Frère Jacques, Frère Jacques, dormez-vous, dormez-vous… »

C’était ridicule mais je me réjouis de reconnaître une des comptines qui avait bercé mon enfance. On se mit à rire.

« Ce piano appartenait à ton père, il nous l’a offert quand on a aménagé ensemble il y a quatre ans. Tu avais toujours rêvé de savoir en jouer et ça t’a permis d’apprendre. »

Je n’osais pas le toucher car je n’avais aucune idée de comment on en jouait. Je restai un moment planté devant comme un imbécile puis je me décidai à appuyer sur une touche. Le son qui en sorti fût très grave et fort. Un cri m’échappa. Maurine s’affola et courût à mon secours.

« Qu’est-ce qui se passe, tu ne te sens pas bien ? C’est ta tête ? Est-ce que tu as mal à la tête ? »

« Non, non, tout va bien, c’est juste le piano, il m’a fait peur. »

Elle poussa comme un soupire de soulagement.

« Tu m’as fait une de ces frayeurs, ce n’est qu’un piano! »

A peine arrivé dans ce monde et je me faisais déjà engueuler d’avoir crié à cause d’un piano.

« Bon, on n’a pas vraiment le temps de rester ici, il faut qu’on mange et je n’ai pas eu le temps de faire des courses du coup on va aller dehors puis après je te dépose chez ta mère, moi je dois partir travailler. »

J’avais l’impression d’être un enfant dont on défait les bagages, qu’on a dans les pattes et qu’on essaye de caser là où on peut. J’avais envie de proposer de rester seul mais ce n’était certainement pas prudent et puis j’avais hâte de refaire connaissance avec ma mère.

 

« Qu’est ce que tu veux commander ? »

Quelle drôle de question, elle savait certainement mieux que moi mes goûts culinaires, la seule chose dont je me rappelais c’est qu’enfant je n’aimais pas la soupe.

« La même chose que toi. »

Au comptoir la serveuse portait une casquette et semblait stressée.

« Deux menus Big Mac s’il vous plaît. »

On fût servi tout de suite et on partit s’asseoir.

« Tu as l’air d’aimer ! Avant tu me faisais toujours des histoires pour manger chez McDo. »

Les deux mots préférés de Maurine semblaient être « avant » et « docteur », ils étaient presque à chaque début de phrase.

«  Je ne sais pas trop, mon seul point de comparaison est le petit déjeuner de ce matin à l’hôpital, je ne sais pas ce que ça vaut. »

Elle sourit.

Je n’eus pas le temps de lui demander où elle travaillait que j’étais déjà devant la porte de chez ma mère.

« Je viens te récupérer dès que j’ai fini, vers 17h30 ou 18h s’il y a des embouteillages. »

« Pourquoi tu ne me laisses pas rentrer à pied ? On habite à cinq minutes, j’ai même reconnu l’immeuble en passant tout à l’heure. »

« Et si tu faisais un malaise ? Non c’est pas sérieux. »

Elle eut un moment de réflexion.

« Bon ok mais si tu as un problème tu m’appelles avec ton téléphone ou tu cries comme pour le piano tout à l’heure, d’accord ? »

J’acquiesçai même si je ne savais sûrement plus me servir d’un téléphone portable.

Je sonnai à la porte, un peu anxieux.

Une dame d’à peu près cinquante ans m’ouvrit et me serra aussitôt dans les bras pendant qu’une ribambelle de gamins s’était agglutinée autour d’elle.

« Ca me fait tellement plaisir que tu sois là, entre mon chéri ! »

Dans le hall, il y avait un miroir plaqué à un placard, j’y vis inévitablement mon reflet et je sentis mon cœur se resserrer. C’était donc moi. J’avais le regard vide et l’air très fatigué mais j’étais plutôt pas mal autrement : brun aux yeux verts, grand, mince mais pas trop. Je restai bloqué comme devant le piano et la voix d’une des enfants me réveilla :

« Qu’est-ce qu’il a Jeremy ? Il est devenu toc toc ? »

« Mais non ma puce, il sort juste de l’hôpital, il est un peu secoué c’est normal. Allez retourner vite jouer ! »

Ils coururent tous dans le séjour.

« Ah ces gosses, aucun tact ! »

« C’est rien, après tout c’est vrai que je suis un peu toc toc. »

Ca la fit sourire.

« Alors comment ça va depuis ce matin ? »

« Je me pose des questions alors que tout semble couler de source pour tout le monde. »

« N’hésites pas à en poser, le docteur a dit que c’était important. »

Le docteur… Elle ne va pas s’y mettre elle aussi.

« Et puis l’orthophoniste sera là pour ça. »

Je me contrefiche de l’orthophoniste, ce qui m’intéresse c’est ceux qui peuvent m’en dire le plus sur ma vie, mon ancienne vie.

« Qui sont ces enfants ? La petite a dit mon prénom tout à l’heure, je les connais bien? »

« Ah ça oui tu les connais ! Je les garde tous les soirs de la semaine et les mercredis. Lisa c’est ta petite préférée ! Tu passes presque tous les jours pour leur dire bonjour. »

C’est marrant elle parle au présent et pourtant je ne les connais plus et peut être que dans cette seconde vie Lisa ne sera plus ma préférée.

« Et Papa, où est-il ? »

Le visage de ma mère s’assombrit. Sans m’en rendre compte je venais d’aborder un sujet grave.

« Il est mort, tu ne te souviens pas ? »

Elle semblait surprise, moi pour un amnésique je trouvais ça plutôt normal.

« Non, je suis vraiment désolé. Maurine a dit qu’il nous avait offert un piano, j’ai cru que… »

« Oui, lorsque vous avez emménagé ensemble. Il nous a quitté deux ans après. »

J’aurais aimé pouvoir partager la peine de ma mère. Mon père mourrait pour la deuxième fois et ça ne me faisait pas grand-chose. Ca a pourtant du faire mon malheur la première fois. Je mourrais d’envie de savoir de quoi il était mort, comment je l’avais vécu et d’arracher ces quelques bribes de mon passé à cette dame mais ça semblait trop douloureux pour elle.

« Qu’est-ce que tu penses de Maurine ? » me demanda-t-elle.

« Elle est charmante mais je sens que mon état l’angoisse. »

« Oui, c’est parce qu’elle était là le jour où tu as fait ta crise, c’est elle qui t’a amené aux urgences. »

Elle s’arrêtait comme si je savais de quelle crise il s’agissait et ça m’énervait de devoir la pousser à me raconter la suite.

« Une crise de quoi ? »

« Les médecins ne te l’ont pas dit ? »

« Probablement si, mais à mon réveil on m’a assommé de diverses informations, je n’ai pas tout retenu. »

« Une nuit tu as fait une crise d’épilepsie, ce n’était pas la première fois mais disons que cette nuit là tu n’es pas sorti de la phase d’inconscience et tu ne respirais plus. »

J’avais tout imaginé, l’accident de voiture, la rupture d’anévrisme mais je n’avais pas pensé à l’épilepsie qui était une maladie dont je ne me rappelais même pas les symptômes.

Je sentis que je ne pourrais pas tirer aujourd’hui plus d’informations de ma mère et nous avons passé le reste de l’après-midi à jouer avec les enfants. Elle glissait tout de même de temps en temps une petite anecdote me concernant. On voyait qu’elle me voulait du bien. J’avais certainement eu la meilleure mère qu’il soit mais pour l’instant je n’avais que ces yeux pour me le dire.

Je pris congé aux environs de 17h. Dans la rue, mon chemin rencontra celui d’un chien tout aussi perdu que moi. Il était tout petit et tout blanc. Il me suivit tout au long de mon parcours. Je rencontra également McDonald’s, le restaurant dans lequel nous avions mangé le midi et étrangement il n’était pas au même endroit. Puis quelqu’un m’interpella et vint me saluer. Evidemment je ne reconnus pas le jeune homme mais je fis mine de rien car il ne semblait pas au courant de mon petit coma.

« Alors ce mariage, il se prépare ? »

Je répondis du tac au tac :

« Doucement mais sûrement. »

« Tu passeras le bonjour à Maurine. A plus Jerem’. »

On allait donc se marier. Comment était-il au courant ? Est-ce qu’on avait déjà fixé une date et envoyé des cartons d’invitations ? Je n’avais plus qu’une envie, rentrer et assommer Maurine de questions.

Devant l’immeuble, je sortis discrètement mon petit bout de papier sur lequel j’avais écrit le digicode car ça n’avait pas manqué, je l’avais oublié. Le petit chien était toujours là et comme j’avais apprécié sa compagnie je le laissai me suivre jusqu’à l’intérieur mais une fois devant l’ascenseur, impossible de savoir à quel étage j’habitais. Je pris donc l’escalier et grimpa les étages en regardant désespérément chaque plaque pour y trouver une Maurine ou un Jeremy ou bien les deux.

Il était encore trop tôt pour que Maurine soit arrivée, ce qui, malgré ma soif de savoir, m’arrangea car je pus observer l’appartement dans ses moindres détails. Dans la chambre, il y avait un magnifique portrait noir et blanc de Maurine sur la commode. Elle était totalement différente de ce que j’avais pu en voir. Elle était très peu maquillée, avait les cheveux au vent et semblait tellement libre et heureuse qu’on l’enviait presque. Au fond du couloir, il y avait une pièce avec une affiche sur la porte où était écrit « Fermé au public ». Cela me refroidit, pourtant j’étais chez moi et aussi bien j’étais responsable de cette stupide affiche. Tout de même intrigué, je pénétrai. C’était une chambre noire, des photographies pendaient sur un fil comme si elles venaient d’être développées, il y avait également un énorme appareil photo posé sur le plan de travail. Sur les photos, un pêcheur sur un bateau sous toutes les coutures. Des casiers étaient remplis d’albums mais lorsque je m’apprêtai à en ouvrir un dans l’espoir d’y trouver une photo de mon père, j’entendis la porte d’entrée et je remis tout en état comme si j’avais franchi l’interdit et qu’il ne fallait pas que je sois découvert.

« Ouf tu es là mon chéri, j’avais peur que tu ne retrouves pas le chemin. »

Elle allait s’approcher pour m’embrasser lorsque quelque chose la stoppa.

« Mais qu’est-ce que ce chien fait là ? Bon sang Jeremy, ne me dis pas que tu as ramené ce chien chez nous ? »

Et voilà j’étais de nouveau le gamin qui cette fois avait fait une bêtise.

« Enfin tu sais bien que j’ai horreur des chiens et que j’en ai une peur bleue ! »

Non, je ne sais pas justement.

« Il était seul et il m’a suivi depuis chez ma mère. Il est inoffensif ce chien, regarde il est tout petit, de quoi as-tu peur ? »

« Ca ne se contrôle pas ce genre de chose et ce n’est pas proportionnel à la taille figure-toi. Je me fiche de savoir qu’il était seul enfin mince qu’est-ce que tu vas nous ramener la prochaine fois ? »

« Oui mais je l’aime bien ce chien. Et si j’ai envie de le garder ? »

«Il appartient sûrement déjà à quelqu’un et on s’était mis d’accord la-dessus. »

Voilà t-il pas que mon ancienne vie me tombait de nouveau sur les épaules. Je me devais de tenir des engagements, des compromis que je ne suis même pas conscient d’avoir fait. Ce n’était pas moi ou du moins ce moi là il n’existait plus.

« Tu as regardé sur son collier s’il y avait un numéro ? »

« Quel collier ? »

Je jetai un bref coup d’œil vers le chien et effectivement il portait un collier autour de la gorge. Je lui détachai du cou et vis qu’il portait un numéro de téléphone.

« Bon je vais appeler » dit Maurine.

J’eus envie de l’en empêcher mais je n’avais pas le droit.

« Ils viennent le récupérer tout à l’heure. Désolée de m’être emportée, je suis juste un peu fatiguée, en plus ça n’avançait pas tout à l’heure Boulevard Saint-Germain, comme d’habitude. »

« Je peux te demander quelque chose ? »

« Oui bien sûr vas-y. »

« On va se marier ? »

« Je ne sais pas mais… »

Elle me montra sa main gauche. Elle portait une bague à l’annulaire.

« …on est fiancé .»

C’est drôle, cette bague était très belle mais ça me faisait penser au collier de chien. Elle la portait pour montrer qu’elle appartenait à quelqu’un.

« Tu sais, je me montre peut-être un peu dure avec toi mais on était heureux et toute cette histoire m’a fait très peur. Tu n’es pas conscient de tout ça et ce n’est pas ta faute. Je sais que je ne peux pas te demander de m’épouser comme c’était prévu, ni même de m’aimer et tu dois te dire mais qui c’est cette tarée qui m’interdit d’avoir un chien et qui me joue Frère Jacques au piano… »

J’avais envie de sourire car oui je m’étais dit qui est cette tarée mais je trouvais ça tellement mignon que je la pris dans mes bras et l’embrassa presque naturellement.

« J’aimerais savoir qui j’étais.»

J’aurais dû tenir un journal intime dans ma vie précédente, ça aurait été plus simple.

« On s’est rencontré lors des inscriptions à l’Institut de photographie Spéos, toi tu venais d’obtenir ton diplôme et tu exposais dans le hall. J’ai trouvé qu’il y avait quelque chose d’original dans tes photographies, une lumière, une ambiance qu’on retrouvait dans chacune d’elles. Alors nous avons discuté et tu m’as proposé de poser pour toi pour une série de portrait noir et blanc. On a continué à se fréquenter et un jour tu m’as embrassé. Ensuite les choses se sont assez vite enchaînées. Tu voyageais beaucoup, je t’accompagnais. On est allé à New York, Londres, Bombay,… et puis ton père est mort. D’une crise cardiaque. Ton père c’était l’artiste, ta source d’inspiration. Pendant un an tu ne mangeais et dormais presque plus. J’étais inquiète car sa mort avait déclenché chez toi de fréquentes crises d’épilepsie. Finalement la vie a pris le dessus et les crises étaient de plus en plus espacées. Je te pensais même guéri car tu n’en avais pas eu depuis un an et la semaine dernière tu as voulu qu’on aille en Bretagne pour faire des photos des marins bretons. Tu étais enchanté du voyage et dès qu’on est rentré tu t’es enfermé dans la chambre noire. C’est cette nuit là que tu as rechuté. Je t’ai vu mourir sous mes yeux. »

Les larmes coulaient le long de ces joues roses. Moi je n’arrivais pas à en verser une. C’était donc moi l’auteur de ces nombreuses photographies. Je me découvrais encore un talent insoupçonné qui m’avait été arraché. Je me revoyais à Bombay prendre en photos le visage des beautés Hindoues mais je ne sais pas si c’est un souvenir qui me revient ou de la simple imagination. Cette fille était donc dans ma tête, mais est-ce que c’était une présence ou une obsession ? Et mon père, pourquoi ne pas avoir réussi à faire son deuil ? Et comment pourrais-je le faire maintenant qu’il a disparu de ma mémoire ?

 

Le lendemain, avant d’aller travailler, Maurine me déposa chez l’orthophoniste et comme j’étais un peu en avance je m’arrêtai à la boulangerie du coin.

« Bonjour Madame, un pain au chocolat s’il vous plaît. »

« Ca vous fera quatre-vingt-dix centimes. »

Je fouille dans mon porte-monnaie et je fus surpris de voir de petites pièces jaunes plutôt épaisses. Je n’ose rien dire mais je me rappelle très bien enfant avoir de grosses pièces métallisées pour m’acheter des bonbons au bureau de tabac.

Dans la salle d’attente il y a un ordinateur à disposition des patients. Je peine à m’en servir mais les réflexes reviennent vite. Je tape « Monnaie» et « France » dans le moteur de recherche. Je découvre alors que nous sommes passés à l’Euro depuis 1999. J’en profite aussi pour faire une recherche sur ce fameux McDonald’s dont je vois les restaurants et la publicité partout. Je tombe sur d’affreux pamphlets qui dénoncent la contribution du fast-food dans la déforestation, l’obésité, la faim dans le monde ou encore l’exploitation des employés et je me demande pourquoi Maurine m’a emmené là bas.

L’orthophoniste me reçu enfin. C’est affreux à dire mais je la trouvais plus belle que Maurine. Elle portait elle aussi une bague au doigt et j’en conclus qu’elle appartenait à quelqu’un d’autre. Sa voix était douce et rassurante.

« Est-ce que vous pouvez me citer des marques de voiture ? »

« Euh, oui. Renault, Mercedes, Volkswagen, Peugeot. »

« Très bien. Maintenant des marques de lessive. »

« Hum…Omo, … Paic ? »

« Oui, enfin concernant Paic il s’agit plutôt d’un produit vaisselle. »

« Ah, je devais plus souvent faire la vaisselle que des machines. »

Elle sourit.

« Pouvez-vous me citer des marques d’appareil photo ? »

Ce fût le trou noir et je me sentis piégé.

« Rien ne me vient, c’est assez ironique étant donné que j’ai appris hier que j’étais photographe. »

« Ce n’est pas grave. »

On fît quelques autres tests de mémoire et j’eus le sentiment que je pouvais me confier à elle.

« Je ressens une douleur. »

« Quel genre de douleur ? »

« Psychologique, vous savez celle qui vous bouffe de l’intérieur. Je vis dans l’ignorance la plus totale. J’ai eu une vie et on me l’a volé. Elle ne m’appartient plus, elle appartient aux autres. Je me sens violé de l’intérieur, de mystère en mystère. Bien sûr on me raconte, j’ai été photographe, j’ai perdu mon père, je vais me marier mais ce ne sont que des faits, des informations, des connaissances toutes roides sans saveurs, sans odeurs ni émotions. Je m’accroche aux souvenirs les plus ridicules comme ceux qui remontent à l’âge de Pierre ou celui d’il y a cinq minutes. Qui suis-je ? Ce nouveau moi qui n’a ni envie de faire de la photographie ou de se marier. Qui va-t-il devenir ? Je vois l’inquiétude de ma mort et la déception de mon absence dans le regard de mes proches. Mes questions les froissent, leur met la larme à l’œil. Et pourtant je dois faire le deuil de cette vie, m’en détacher pour revenir à ce monde. »

Publicité
Publicité
23 septembre 2010

You're the Apple of My Eye

P825054923

22 septembre 2010

Walk Away

22 septembre 2010

A bullet in the heart

1.



She is smiling. She is smiling to me because I’ve just made her laugh. I love her and she’ll probably never know. It is one of my latest chance to tell her but I won’t grab it since I’m scared. The funny thing is that I’m more scared about this than dying. She doesn’t know both of it right now so I can still look at her smiling. I know exactly how she would react about me not wanting to go to that war. First, she would get mad at me, telling me that for once I could keep my pride away, then she would try to convince me to go as it is my only way to survive and finally she woud be so upset that she would leave me here at that bar, alone. I don’t want that to happen but unfortunately it is happening :

“You’ve got to be kidding me. What you’re saying is that you’d rather die than fight? Right, I know it’s not your fight and that you don’t agree with our current society but you never did and you never did nothing about it either and believe me there are so many other ways to show your disagreement. I mean, come on, you don’t even demonstrate!”

“There is a world between not demonstrating and killing people.”

“Who tells you that you’re going to kill people? Maybe joining the Army is not so bad and you could help people there”.

“I don’t see any intentions of helping in a war. First thing to do to help these people is to stop that war and you know it.”

“Oh yeah and you think you’re going to stop it by not going? You won’t be a world saver but a coward who prefers to die.”

“Maybe my life is not worth a thousand ones.”

“And maybe there are people here who love you, but apparently you don’t so you’re right, go kill yourself.”

Those words echoed in my head. Do you love me? I can’t say that loud. She left as I predicted. How could she think that I don’t love her?


2.


She’s always been naïve in such a way that she was thinking the world could change one day. Unlike me, she believed in human being. I was convinced that everybody was resigned and won’t make one single step to protest against what is wrong in our society and some people wasn’t even aware that there is actually something wrong. I call them the”Asleep’s”. The Asleep’s aren’t curious and agree with everything that goes on Channel 4. Their ultimate goal and success in life is to have a well-paid job and a family with a white house and a green garden but if by any misfortune the grass happens to be greener in their neighbour’s garden, they’re not happy anymore. The system creates and cultivates the Asleep’s in order to make them more asleep than they already are, and this until the Earth will be filled of people completely dead inside.

The first time I mentioned the Asleep’s to her, she went upset as if I broke her dream but above all, she was scared to be one of them. She’s always been politically engaged and everytime she got the opportunity to do something against what she thought was wrong, she did it. But the world was still there, unsolved and unchanged. When somebody or something shows her that somehow the world is lost, it feels like a punch in her face. But she was quick to forget and get back on her feet. She had her own convictions and was decided to stick to it whatever happens. Now she’s asking me to do something which represents everything I hate in this world. She asking me to become one of the Asleep’s.


3.


I remember exactly the moment when I was called to join the Army. I knew it was going to happen but there was a little piece of my heart that was hoping they will forget about me. It reminds me at school when each pupil, one by one, had to stand in front of the entire class and recite a poem. I was sitting at my desk strongly hoping that the teacher will drop my name or the bell will ring just in time. And just like when I was six, the bell rang but this time I knew my turn was coming.

They explained to me that they needed people and everybody who was able to fight would be required. But most importantly, they said there was no way to decline the offer otherwise it would be a free ticket to death. They gave me one day to pack and say goodbye.

I was aware that the situation was getting very serious and I heard about one guy who refused to enroll and had been killed but I thought it was just a way to set the example - Society likes setting examples to show people how they have to behave so they could keep them under control – I never thought I was going to be one of the examples.

I took my decision right after they left my appartment, maybe even before. It wasn’t really about my convictions but more out of stubbornness. I had already questionned myself about whether or not I will take part of this armed conflict if requested and my answer, for obvious reasons, was no. Why would I change my mind now? Because they are threatening me? I know I’m right and I don’t want to take into account the fact that they are going to get rid of me, it would be too easy for them so I’ll be standing in their way.


4.


Saying goodbye is always a tough thing to do and it becomes even harder when you know you’re never going to have the chance to say hello again. I can’t imagine telling my parents my decision, they really don’t deserve this. They have worked their ass off to provide me a good quality of life like high education and I never went short of anything especially love. I am their only child and the simple idea of letting them down kills me more than my own death coming up. I always had this bad habit to do things in order to make them happy, I mean proud of me. Everytime I fail, I can’t help thinking about me disappointing them instead of being sad for myself. They never told me what I had to do with my own life and respected every decision I made but maybe this time I was going a little bit too far. I thought about all the different possibilities to break the news: giving them a phone call, writing a letter, asking someone to inform them or - and this would have been the one that suits me best – letting them ignore about it. The thing is, what kind of child would I be if my parents were hearing about my death in the newspaper? So I decided to visit them and tell them the truth.

I didn’t mention the reason of my visit because I wanted to see them happy for the last time of my life. And I was sure that once they know they would be inevitably sad, no matter how much I’ll ask them not to be. I fully enjoyed the moment. It felt so good to be at home, the only place where I’ve always felt safe at ten as well as at twenty. It was smelling cinnamon sticks because my mother was used to put one of them everywhere she could: in cakes, rice, tea, closets… It has this sweet and woody fragrance that everytime I smell it, it reminds me my childhood. My mother was a strong woman who lost her mother when she was twelve and become one at the same time as she had to take care of her three sisters. That is probably the reason why I am her only son. She never complained about her life and when she talked about it, it was always in a kind way. I remember one day when we had this conversation about what we would change in our respective lives and she told me that she wouldn’t change a thing, even if she were dying the next day. This was how she knew she was happy. I wish I could say the same thing today but I realized that there are so many things I have to do before I left this world forever.

Surprisingly, my parents understood my decision and stayed very calm in their reaction but I saw in my dad’s eyes that he was within a hair’s breadth of passing out. My mother was still in a state of shock but I knew that when it will hit her she would be completely depressed and unconsolable. Somehow they were agreeing with me but any parents could approve their child’s death. They said that I still had ten hours left to think about it carefully and make sure it was the right decision but they perflectly knew that I had already made up my mind.

Right before I left I had no idea of what I could say to them. Thanks for everything? I love you both? They already know all that stuff. I just came up with a simple “Goodbye” and a big hug.


5.


Now I have until the end of the day to do everything I haven’t done in my life and that I wish I had. Unfortunately it was too late for the big trip around the world I’ve always dreamed of. I can give myself thousands reasons for haven’t done it before:

- I was in school so I did not have a lot of money to spend

- I had nobody to go with

- There were people here that I wasn’t willing to leave like my grandpa, I mean what if he was dead when I got back?

I could go on like this but I’m completely aware that it is all a lie. I could have taken a break from school and worked for a while to make some money. Nobody wanted to come with me? Then why not going alone. There’s just one thing which is actually true: there is someone here that I’m really not ready to leave.

Some people say that we should live as if we were going to die the following day. I don’t really share their point of view. We have to take into consideration that we might be still alive the day after tomorrow. And if I got bankrupt to fly to Honolulu it could be a problem then. So call me a killjoy but I’ve never been able to live unconsciously. Maybe I’m lying to myself again.

There are some things in my life that I really enjoyed doing. Painting is one of them. I tried about two years ago because I felt inspired. The funny thing is that I’ve always liked impressionist paintings like those of Monet or Van Gogh but mines were the total opposite. They were a fire work of colors and probably had only a sense for me. I learned that even if the accomplished work seems pretty easy to complete, in fact it represents hours of hard work. Although, spending hours on my canvas has never been a problem, on the contrary it was a source of pleasure. I could have spend hours and hours on my work without even eating or sleeping because I was so eager to reach what I had in mind and it was such a torture to wait for the paint to dry!

After four or five paintings, I stopped. I felt like I was spent. All the inspiration had gone away and I wasn’t able to paint just for the sake of painting. Besides, when you have already done pretty good things, you become really scared not to be as good as you were. I like staying on a positive touch. It’s like when I play tennis, I can’t stop playing on a fault. I guess everybody is willing to be remembered for their best and not for the flop they did one day. Unfortunately, people have this bad tendency to forget the good and memorize the bad. I prefer not to risk myself doing a flop.

When I’ve got an idea, I get really enthusiastic about it but in general I need someone to encourage me so here is how I work: I start my work then expose it to someone’s opinion (I don’t choose the critic randomly) and if not rejected I go on even more enthusiastic. I need to submit my project to a particular person at the very beginning because I couldn’t stand a bad critic once I have put all my heart and soul in my work. I’m aware that a real artist doesn’t work that way. He doesn’t care about any opinions and has no limits. That’s why his work is so beautiful and true. He did it without any ulterior motives which could denature his work.


6.


I am used to get up very early when everything is still asleep. Nature reaches its highest form of beauty in the morning. The sun is already burning but it is softened by the fresh dew and I love observing the drops on vegetables. The sea is quiet, not yet disturbed by people, no footprints on the fine sand. I open the dance by diving and look at the fish shoal who are running away from me.

Nature and man always encountered problems to cohabit. Man have enough difficulty to live together that they forget about the rest. Nowadays, people are suddenly becoming green friendly and they will tell you how bad nuclear centrals are for our planet and that you should definitely sort your rubbish. But before they had no problems with throwing everything in one dustbin, so why now? It is not because out of the blue they realized that their behaviour was noxious towards the environment but only because they understood that our planet won’t serve them anymore so they have to take it into account otherwise it will kill them.

We act on things when they are getting very alarming, in case of emergency or if we have no other choices. Considering that dying is quite an alarming situation, I decided that some things had to be said.


7.


From the moment I was out, I was already sweating. It was six o’clock but the sun was burning as if it was two. When I arrived in front of her building I was relieved to come accross someone who was getting out because I was terrible at memorizing door codes. I wasn’t feeling like going up the four floors because of the heat so I decided to use the lift. It was a very old one, the kind in which you’re afraid to get stuck.

I survived the lift and headed her apartment. She had left her bike outside the door, linked to a chair with a padlock. I hesitated and rang.

She didn’t seem surprised to see me. She was wearing the same multi colors dress as this morning that would fit to anyone else but her. Her matt complexion allowed her to look well even in her saddest days but her eyes betrayed her: they were bloodshot but greener than ever.

She invited me to come in with a shy smile but once in, she broke down in my arms and burst into sobs.

It was the first time that she was so close to me and I was afraid to touch her. I gently stroke her hair; they were smelling coconut, probably her conditioner which gives her this beautiful long straight dark hair. I was happy and angry at the same time.

“Please don’t leave me, please…” Her voice was shaking.

“You never asked me to be with you.” I snapped back.

I felt awful saying that while she was crying but I truly meant it.

“How could you say that? I asked you, this morning…”

I cut her short:

“Only because I’m going to die. In fact, do you know what really kills me? It is that I love you in a way that you probably can’t imagine and if you were feeling even one shred of what I feel for you, you would have been the one knocking at my door.”

There was a silence and I saw in her face that she was really sorry.

At this very moment, when I least expected it, she kissed me. Suddenly I felt alive and I thought I could have lived on that kiss forever.

I realized how big my mistake was.


8.


He’s dead. It’s been four months now. But two days after he died I received a letter from him, I immediately recognized his handwriting. I thought I was dreaming and I practically died opening it. It was a series of notes he wrote on different kind of papers, some were on a piece of newspaper, others on post-it notes. There was no date but it seemed to be in chronological order, at least I could testify it for the first and the last paper. It was a great shock to me to go through what happened again. I was angry against him, against the government. But I think he gave this to me not to hurt me but because he thought I’d be the best person to know what to do with it. At first, I thought it was too personal to be read by anyone else but then I realized it was about something that affects everyone: Love.

22 septembre 2010

The trees forgive me so why can't you forgive me

P8060077

Publicité
Publicité
28 novembre 2009

I stepped into an Avalanche

I_stepped_into_an_Avalanche

28 novembre 2009

I think I'm drowning

I_m_think_I_m_drowning

27 novembre 2009

Here comes a delivery

Here_comes_a_delivery

27 novembre 2009

Belzunce breakdown

Belzunce_breakdown

27 novembre 2009

Anyone else but You

Anyone_else_but_You

Publicité
Publicité
1 2 > >>
Publicité